II. PERCONTANDI FORMA IN PRIMO CONGRESSU

QUESTIONNEMENT-TYPE DANS UNE RENCONTRE

 

Percontandi de valetudine (in integro). S'enquérir sur la santé.

GEORGIUS,  LIVINUS.

Ge.  Valesne?

Li.   Contemplare vultum.

Ge.  Quin potius lotium iubes? An me putas medicum? Non rogo, quid valeas; nam facies ipsa loquitur, te belle valere: sed quomodo tibi placeas.

Li.   Corpus quidem belle habet, sed animo male est.

Ge.  At non valet, qui isthac parte laborat.

Li.   Sic res habent meae: corpus valet, sed aegrotat crumena.

Ge.  Facile isti morbo medebitur mater. Ut valuisti usque?

Li.   Varie, ut sunt res mortalium.

Ge.  Satin' recte vales? Salvane res? Satin' salvae res? Fuistine semper prospera valetudine?

Li.   Prosperrima, gratia superis. Ego Dei beneficio perpetuo bellissime valui. Semper prospera valetudine sum usus. Hactenus bona valetudine fui, fausta, incolumi, felici, prospera, secunda, integra, basilica, athletica, pancratica valetudine.

Li.   Equidem pulchre valeo, si tu vales.

Ge.  Nihil interim molestiae fuit?

Li.   Nihil, nisi quod vestra consuetudine frui non licuit.

Ge.  Quo pacto vales?

Li.   Recte, pulchre, belle, perbelle, bellissime, perpulchre, feliciter, commode, minime male. Valeo, ut volo potius, quam ut mereor, basilice, pancratice, athletice.

Ge.  Exspectabam, ut diceres etiam, taurice.  

  

Ge.  Vas-tu bien ?

Li.   Regarde ma figure.

Ge.  Pourquoi ne m'ordonnes-tu pas plutôt d'exa-miner ton urine ? Me crois-tu médecin ? Je ne te demande pas comment tu te portes, car ton visage dit par lui-même que tu te portes à merveille, mais dans quelle mesure tu es content de ta personne.

Li.   Physiquement, c'est vrai, je me porte à merveille, mais moralement, ça ne va pas

Ge.  Mais on ne se porte pas bien quand on souffre de ce côté-là.

Li.   Voilà où j'en suis : le corps se porte bien mais le porte-monnaie est malade.

Ge.  C'est une maladie à laquelle ta mère remédie-ra facilement. Comment t'es-tu porté jusque-là ?

Li.   Avec des hauts et des bas, comme vont les choses humaines.

Ge.  Est-ce que tu vas assez bien ? Ca va ? Est-ce que tout va assez bien ? As-tu toujours été dans une bonne santé ?

Li.   Excellente, grâce au Ciel ! Moi, grâce à Dieu, je me suis toujours ("perpetuo") porté parfaitement bien. J'ai toujours joui d'une bonne santé. Jusqu'à présent, j'ai été dans une bonne forme, très bonne, parfaite, heureuse, prospère, (idem), irréprochable, royale, athlétique, (idem).

Li.   A la vérité, je vais très bien si tu vas bien.

Ge.  N'as-tu pas eu d'ennuis pendant ce temps-là ?

Li.   Aucun, si ce n'est qu'il n'a pas été possible de jouir de ta compagnie.

Ge.  Comment vas-tu ? (Même question)

Li.   (Réponses avec des adverbes :) Bien, très bien, (idem), parfaitement bien, (idem), (idem), avec bonheur, à mon avantage, pas mal du tout. Je vais plutôt comme je veux, mieux que je ne le mérite, je me porte comme un roi, comme un athlète, (idem).

Ge.  Je m'attendais à ce que tu dises aussi : comme un taureau !

Percontandi de valetudine. Male valere. S'enquérir sur la santé. Aller mal.

Ge.  Rectene vales?

Li.   Vellem quidem. Non admodum ex sententia. [...] Valeo ut possum, quando, ut volo, non licet. Ut soleo. Ita, ut superis visum est. Non optime sane. Sic, ut antehac peius nunquam. Valeo, ut solitus sum.

Ge.  Ut vales?

Li.   Secus quam vellem.

Ge.  Qua valetudine es?

Li.   Haud sane commoda, incommoda, perquam incommoda, infelici, parum prospera, parum secunda, mala, adversa, infausta, imbecilli, dubia, mediocri, vix mediocri, longe alia, quam vellem, tolerabili, qualem optem hostibus meis.

Ge.  Rem mihi sane quam acerbam narras. Prohibeant superi. Avertat Deus. [...] Bono sis animo oportet. Forti infractoque sis animo. Multum iuvat animus in re mala bonus. Fulciendus est animus spe fortunae secundioris.

Quid morbi est? Quod mali genus est? Quis te morbus habet? Quo morbo teneris? Quid habes morbi? Quis te tenet morbus?

Li.   Nescio, et hoc laboro periculosius.

Ge.  Verum. Nam ad sanitatem gradus est, novisse morbum. Nullosne consuluisti medicos?

Li.   Et quidem permultos.

Ge.  Quid respondent?

Li.   Id, quod advocati (*) Demiphoni apud Comicum: alius negat, alius ait, alius deliberandum censet. In hoc consentiunt omnes, me miserum esse.

Ge.  Quam pridem habet te hoc mali? Diu est, quod teneris isto morbo? Quantum temporis est, quod te malum hoc corripuit?

Li.   Dies plus minus viginti. Ferme mensis est. Iam tertius est mensis. Mihi quidem seculum videtur, quod aegrotare coepi.

Ge.  Adnitendum censeo, ne morbus fiat familiaris.

Li.   Iam nimium assuevit.

Ge.  Num est hydrops?

Li.   Negant.

Ge.  Num dysenteria?

Li.   Non arbitror.

Ge.  Num febris?

Li.   Opinor febris esse speciem, sed novam, ut nunc novi subinde morbi exoriuntur, antehac incogniti.

Ge.  At plus satis erat veterum.

Li.   Ita visum est naturae nimium novercae.

Ge.  Quoto die recurrit dolor?

Li.   Quoto die, narras? immo quotidie. [...]

Ge.  Papae! malum abominandum. Unde contraxisti morbum? Unde suspicaris, hoc esse collectum mali?

Li.   Ex inedia.

Ge.  At non soles usque adeo superstitiosus esse, ut te ieiunio maceres.

Li.   Non erat religio, sed inopia.

Ge.  Quaenam?

Li.   Quia non dabatur cibus.

E frigore natum arbitror.

E putribus ovis morbum ortum suspicor.

E vino plus satis diluto.

E crudis malis contracta est stomachi cruditas.

Ge.  Vide, ne ex immodico aut intempestivo studio conciliaris hoc mali, aut ex potatione largiore, aut Venere parum moderata. Quin accersis medicum?

Li.   Timeo, ne citius morbum augeat, quam adimat. Metuo, ne pro remedio det venenum.

Ge.  Deligendus est igitur, cui tuto fidas.

Li.   Si moriendum est, malo semel mori, quam tot pharmacis excarnificatus.

Ge.  Fac igitur, ut ipse tibi sis medicus. Si diffidis homini medico, precor, ut sit tibi medici vice Deus. [...] 

 

NOTA :

(*) Apud Terentium, in Phormione, 352.

Ge.  Est-ce que tu vas bien ?

Li.   Je le voudrais bien. (Je ne vais pas) aussi bien que je voudrais. [...] Je vais comme je peux, quand il ne m'est pas permis (d'aller) comme je veux. Comme d'habitude. Comme le Ciel en a décidé. Pas très bien, certes. Je n'ai jamais été si mal. Je vais comme d'habitude.

Ge.  Comment vas-tu ?

Li.   Autrement que je voudrais.

Ge.  Comment est ta santé ?

Li.   Pas brillante, c'est sûr, pas brillante, pas du tout brillante, malheureuse, pas très heureuse, pas très favorable, mauvaise, (idem), (idem), faible, incertaine, moyenne, médiocre, tout autre que je ne voudrais, supportable, telle que je la souhaiterais à mes ennemis.

Ge.  Tu m'apprends là une bien pénible nouvelle. Que le Ciel te protège. Que Dieu te préserve. [...] Il faut que tu sois bien courageux. Que tu sois courageux et ferme. Le courage est d'un puissant secours dans l'adversité. Il faut fortifier ton cœur par l'espoir d'un sort meilleur.

Quelle maladie as-tu ? Quel est le genre de mal (dont tu souffres) ? De quelle maladie souffres-tu? (idem ter)

Li.   Je n'en sais rien, et mon mal n'en est que plus dangereux.

Ge.  Certainement ! Car c'est un pas (de plus) vers la guérison que de connaître sa maladie. N'as-tu consulté aucun médecin ?

Li.   J'en ai même consulté beaucoup.

Ge.  Et que répondent-ils ?

Li.   Ce que répondent les avocats à Démiphon dans le théâtre comique (*) : l'un dit non, l'autre oui, un autre estime qu'il faut en délibérer. Mais ils sont tous d'accord pour dire que je suis dans un triste état.

Ge.  Depuis quand es-tu pris ainsi ? Y a-t-il longtemps que tu souffres de cette maladie ? Depuis combien de temps ce mal t'a pris ?

Li.   Il y a plus ou moins vingt jours. Un mois environ. Il y a deux mois (ad verbum : "c'est déjà le troisième mois"). Il me semble vraiment que cela fait un siècle que j'ai commencé à souffrir.

Ge.  Il faut faire en sorte qu'il n'y ait pas de contagion chez toi.

Li.   Le mal s'est déjà trop installé.

Ge.  Est-ce de l'hydropisie ?

Li.   Ils disent que non.

Ge.  Est-ce de la dysenterie ?

Li.   Je ne le pense pas.

Ge.  De la fièvre ?

Li.   Je pense que c'est une espèce de fièvre, mais une nouvelle, comme ces maladies nouvelles que l'on voit souvent apparaître de nos jours et qui étaient jusque-là inconnues.

Ge.  Pourtant nous en avions plus qu'assez des anciennes.

Li.   Ainsi en a voulu la nature, cette vraie marâtre.

Ge.  Au bout de combien de jours revient la douleur ?

Li.   Au bout de combien de jours, tu dis ? Mais tous les jours ! [...]

Ge.  Diantre ! Quel mal abominable ! D'où as-tu ramené cette maladie ? D'où penses-tu avoir pris ce mal ?

Li.   De la privation de nourriture.

Ge.  Mais tu n'es pas à ce point scrupuleux en matière de religion que tu te mortifies par le jeûne.

Li.   Ce n'était pas dû au scrupule religieux mais à la pénurie.

Ge.  Comment donc ?

Li.   C'est que l'on ne nous donnait pas de nourri-ture. Je pense que le mal est venu d'un coup de froid. Je pense qu'il est dû à des œufs pourris. A du vin trop délayé. Mon indigestion a été provo-quée par des pommes trop vertes (jeu de mots avec "crudis-cruditas").

Ge.  Demande-toi si tu n'as pas contracté ce mal par des études excessives ou mal à propos, ou bien d'un abus d'alcool, ou d'un manque de modération dans tes amours. Que ne fais-tu venir un médecin? (accersere = arcessere)

Li.   Je crains qu'il n'augmente le mal au lieu de (ad verbum : "plus vite que de") l'enlever. J'ai peur qu'au lieu de remède il ne me donne un poison.

Ge.  Il faut donc que tu choisisses un médecin auquel tu puisses faire entièrement confiance.

Li.   S'il faut mourir, j'aime mieux mourir une bonne fois que d'être mis à la torture par tant de médicaments.

Ge.  Fais donc en sorte d'être ton propre médecin. Si tu n'as pas confiance en un médecin humain, je prie Dieu qu'il te tienne lieu de médecin. [...] 

 

NOTE :

(*) Chez Térence, dans Phormion, 352.