XIV. FORMULAE

FORMULES

Agendi gratias formula. Formules de remerciement.

PETRUS,  CHRISTIANUS.

Pe.   Gratum mihi fecisti, quod aliquoties ad me scripseris. Habeo gratiam, quod ad me crebrius scripsisti. Amo te, quod interdum ad me litteras dare non dedignatus es. Habeo gratiam, quod crebris litteris me viseris. Ago tibi gratias, qui litterarum fasciculis nos oneraris (*). Maxima tibi a me habetur gratia, qui nos aliquando litteris lacessiveris. Pergratum mihi fecisti, quod nos dignatus sis tuis litteris. Debeo tibi pro tuis humanissimis ad me litteris. Magni beneficii loco duco, quod non es gravatus ad me scribere.

(*) "oneraris" = oneraveris. Cf Gram. p.64, II 1°.

PIERRE,  CHRISTIAN.

Pe.  Tu m'as fait plaisir en m'écrivant plusieurs fois. Je te remercie de m'avoir écrit assez souvent. Tu es un vrai ami, pour n'avoir pas refusé de m'envoyer une lettre de temps en temps. Je te suis reconnaissant de m'avoir rendu visite par de fréquentes missives. Je te remercie, toi qui nous as chargé (*) du poids des liasses de tes lettres. J'ai une très grande reconnaissance envers toi qui nous as assailli parfois de tes lettres. Tu m'as fait un très grand plaisir de nous avoir jugé digne de tes lettres. Je te suis débiteur pour les lettres que tu m'as si gentiment envoyées. Je considère comme un grand bienfait que tu n'aies pas refusé de m'écrire.

(*) "Oneraris" : parfait du subjonctif. Cf Gram. § 268.

Nova rogandi formula. Formules pour demander des nouvelles.

Pe.   Nihilne novarum rerum adfertur e patria? Num quid novi de nostratibus accepisti? Quid novi? Ecquid novarum rerum apportas? Num quid novi fertur? Num quae res novae e patria nuntiantur?

 

Responsio.

Ch.   Novi quidem permultum, at nihil veri. Novarum quidem rerum satis, at nihil comperti. Nova permulta, at explorati nihil. Non parum novi, at veri non multum. Nihil adfertur novi. Novarum rerum nihil prorsus accepi. Certi nihil, novi nonnihil. Rumores adferuntur permulti, sed dubii. [...]

Nihil habeo praeter ea, quae iactantur in tonstrinis, in vehiculis, et in navibus.  

Pe.   N'est-il venu aucune nouvelle de notre pays? N'as-tu rien apporté de nouveau au sujet de nos compatriotes ? Quoi de neuf ? Quelle nouvelle rapportes-tu ? Est-ce que l'on raconte quelque chose de nouveau ? Rapporte-t-on du pays quelque chose de nouveau ?

Réponse.

Ch.   Des nouvelles, il y en a sans doute beau-coup, mais rien de vrai. Il y a pas mal de nouvelles certes mais rien de certain. Il y a énormément de bruits nouveaux, mais rien de prouvé. J'en sais beaucoup, mais peu de véridique. On ne raconte rien de nouveau. Je n'ai vraiment rien appris de nouveau. De certain rien du tout, du neuf quelque peu. On rapporte des bruits très nombreux, mais douteux. [...] Je ne sais que ce que l'on raconte dans les salons de coiffure, dans les transports en commun et sur les bateaux.

Credo, formula. Formules pour dire qu'on y croit.

Pe.   Facile credo. Haud difficile creditu est. Credi istud perfacile potest. Istud tibi quis non credat? Admodum incredulus fuerit, qui hoc tibi non credat. Profecto habeo tibi fidem. Istius rei mihi facile fidem facis. Credo tibi vel iniurato. Verisimile dicis. [...]

Pe.   Je le crois facilement. Ce n'est pas difficile à croire. Cela est très facile à croire. Qui ne te croirait pas ? Il serait un incrédule complet, celui qui ne te croirait pas. Je te crois assurément. Pour cela, il m'est facile de me fier à toi. Je te fais confiance, même si tu ne me jures pas (tes grands dieux). Ce que tu dis est vraisemblable. [...]

Utilitatis formula. Formules pour parler d'utilité

Ch.   Quorsum spectant litterae sine pecunia? Ad quid tandem inanes conducunt litterae? Quorsum valent, ad quid conferunt, faciunt, prosunt, proficiunt litterae vacuae? [...] Cui bono sunt otiosae litterae? Quid iuvant? Cui sunt usui? Ad quid conducibiles sunt? Quid secum adferunt momenti? Cui rei sunt utiles inanes epistolae?  

Ch. Que signifient des lettres sans mandat ? A quoi donc peuvent servir des lettres frivoles ? Que valent, à quoi mènent, servent, sont utiles, profitent des lettres sans intérêt ? (Idem avec des mots différents).

Nova omnia; formula. Fabula de Epimenide – "Tout a changé". Histoire d'Epiménide.

Pe.   Nihil non novum. Mutata omnia. Novata singula. Universa nova. Vide, quam repente tempus res mutet humanas. Videbar mihi in alium venire mundum. Vixdum decennium abfueram, et non secus omnia admirabar, quam Epimenides, somniatorum princeps, vix tandem expergefactus.

Ch.   Quaenam ista est fabula? Quid isthuc est fabulae?

Pe.   Dicam equidem, si vacat.

Ch.   Nihil fuerit iucundius.

Pe.   Sellam igitur una cum pulvino mihi poni iube.

Ch.   Recte admones; nam sedens commodius mentieris.

Pe.   Fabulantur historici de Epimenide quodam Cretensi, qui deambulandi gratia solus urbem egressus, cum, subita pluviae vi compellente, in quamdam speluncam ingressus obdormisset, quadraginta septem perpetuos annos somnum continuarit.  

Pe.   Tout est nouveau. Tout a changé. (Idem). (Idem). Vois comme le temps a vite fait de changer les choses humaines. J'avais l'impres-sion d'arriver dans un nouveau monde. Voilà à peine dix ans que j'étais parti et je n'étais pas autrement stupéfait qu'Epiménide, le roi des rêveurs, dès qu' il s'est finalement réveillé.

Ch.   Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? (Idem).

Pe.  Je veux bien la raconter si tu as du temps.

Ch.   Rien ne me serait plus plaisant.

Pe.   Alors ordonne qu'on me donne une chaise avec un coussin.

Ch.  Tu fais là une bonne remarque car, en étant assis, tu mentiras plus à ton aise.

Pe.  Les auteurs d'histoires racontent celle d'Epiménide, un Crétois, qui était sorti seul de sa ville pour se promener, lorsque, poussé par la violence d'un orage soudain, il entra dans une caverne et s'y endormit ; il aurait dormi sans interruption pendant quarante-sept ans.  

 

 

Non credo, formula. Fabula sequitur. Formules pour dire qu'on n'y croit pas. Suite.

Ch.   Quid narras? incredibile dictu. Non verisimile dicis. Somnium mihi narras. [...]. Non pudet tam improbae vanitatis? Digna fabula, quae addatur veris narrationibus Luciani.

Pe.   Immo rem narro a gravissimis proditam auctoribus: nisi forte tibi parum spectatae fidei est Aulus Gellius.

Ch.   Mihi vero, quae scribit ille, folia Sibyllae sunt omnia. [...]

Responsio.

Pe.   Quid aliud, quam quae postea prodidit Scotus, et huius farinae sodales? Sed bene cum Epimenide actum est, qui vel tandem ad se redierit: multi theologi nunquam expergiscuntur a suis somniis.

Ch.   Age, facis ut poëta, dignum est: sed perge mentiri.

Pe.   Epimenides igitur somno solutus, e spelunca prodit, circumspicit, mutata videt omnia, silvas, ripas, flumina, arbores, agros, breviter nihil non novum. Accedit ad urbem, percontatur, manet illic aliquamdiu, neque novit quemquam, neque a quopiam agnitus est. Alius hominum cultus, nec idem vultus, mutatus sermo, diversi mores. Nec miror, hoc Epimenidi post tantum annorum evenisse, cum mihi idem propemodum evenerit, qui pauculos annos abfuissem.

Ch.   Quid uterque parens? vivuntne?

Pe.   Vivunt ambo, et valent utcumque, senio, morbo, denique bellorum calamitate confecti.

Ch.   Haec est humanae vitae comoedia. Haec est fatorum lex inevitabilis.

Ch.   Qu'est-ce que tu racontes ? Ce n'est pas croyable. Ton histoire n'est pas vraisemblable. Tu me racontes des balivernes (litt. "un songe"). [...] Tu n'as pas honte de raconter des bêtises aussi extravagantes ? Ton histoire vaut qu'on l'ajoute aux vrais contes de Lucien.

Pe.   Non, non, je rapporte un fait transmis par les auteurs les plus sérieux : à moins que tu n'accor-des que fort peu de crédit à Aulu-Gelle.

Ch.  A dire vrai, pour moi, tout ce qu'il écrit vaut les grimoires de la Sybille. [...]

Réponse.

Pe.   Quelle différence avec ce que Scot et ses amis qui ne valent pas mieux (litt."de cette farine") ont propagé par la suite ? Mais cela a bien fini avec Epiménide, parce qu'il est revenu à lui, même si c'est tardivement ; de nombreux théolo-giens n'émergent jamais de leurs songes.

Ch.  Allons ! Tu parles comme un poète, c'est approprié. Mais poursuis tes mensonges.

Pe.   Donc, Epiménide, délivré de son sommeil, sort de la grotte, regarde autour de lui, et voit que tout a changé, les forêts, les rives, les rivières, les arbres, les champs, en bref, tout est nouveau. Il arrive à la ville, pose des questions, reste là un certain temps et ne reconnaît personne, ni n'est reconnu par qui que ce soit. La façon de vivre des gens est différente, leur air n'est plus le même, leur langage a changé, les coutumes sont autres. Et je ne suis pas étonné que cela fût arrivé à Epiménide après tant d'années quand il m'arrive pratiquement la même chose à moi qui me suis absenté un fort petit nombre d'années.

Ch.   Que deviennent tes deux parents ? Sont-ils en vie ?

Pe.   Ils sont en vie tous les deux, et vont aussi bien qu'on peut aller quand on a été frappé par la vieillesse, la maladie et pour finir la calamité des guerres.

Ch.  Telle est la comédie humaine. C'est la loi incontournable du destin.

Vocabula de affinitatibus. Vocabulaire des parentés par alliance.

Pe.   Coenabis hodie domi?

Ch.   Foris coenaturus sum. Foris coenandum est mihi.

Pe.   Apud quem?

Ch.   Apud socerum meum, apud generum meum, apud nurum meam, apud affinem meum. Affines dicuntur, qui non sanguinis, sed matrimonii coniunctione copulati sunt.

Pe.   Quae sunt igitur usitata vocabula affinitatum?

Ch.   Maritus et uxor, nota sunt nomina.

         Socer uxoris meae pater est mihi.

                 Gener filiae meae maritus.

                 Socrus uxoris meae mater.

                 Nurus filii mei uxor.

                 Levir mariti frater. Levir dicitur ab uxore, ut Helena Hectorem levirum vocat, quod esset nupta Paridi.

                 Fratria fratris mei uxor.

                 Glos mariti soror.

                 Vitricus matris meae maritus.

                 Noverca patris mei uxor.

                 Privignus uxoris aut mariti filius.

                 Privigna filia alterutrius.

                 Rivalis qui amat eandem.

                 Pellex quae amat eundem: ut Thraso rivalis est Phaedriae (*), et Europe pellex est Iunoni.  

(*) In Terentii fabula q.i. Eunuchus.

Pe.   Dîneras-tu aujourd'hui chez moi ?

Ch.   Je dois dîner dehors. Je dois sortir pour aller dîner.

Pe.   Chez qui ?

Ch.   Chez mon beau-père, chez mon gendre, chez ma bru, chez un parent par alliance. On appelle "parents par alliance" ceux qui sont associés non par le lien du sang mais par celui d'un mariage.

Pe.   Quels sont donc les termes utilisés pour les parentés par alliance ?

Ch.   "Mari et femme" sont des mots connus.

    Mon beau-père est le père de ma femme.

    Mon gendre, le mari de ma fille.

    Ma belle-mère la mère de ma femme.

    Ma belle-fille la femme de mon fils.

    "Levir" (en latin) se dit du frère du mari. Le mot est employé par la femme : par exemple, Hélène appelle Hector "levir" parce qu'elle est mariée à Pâris.

   La femme de mon frère est une belle-soeur.

   La sœur du mari est une autre belle-soeur.

   Le second mari de ma mère est mon beau-père.

   La seconde femme de mon père, ma belle-mère.

   Le beau-fils le fils de la femme ou du mari.

   La belle-fille la fille de l'un ou de l'autre.

   Le "rival" celui qui aime la même femme.

   La "rivale" celle qui aime le même homme : par exemple, Thrason est le rival de Phèdria (*) et Europe la rivale de Junon.

(*) Dans la pièce de Térence, L'Eunuque.